Au plus dense de la nuit
Deux faisceaux pivotent et se croisent.
Inlassablement, le phare luit
Que l’on voit de loin ou d’à peine quelques toises.
Tel le navigateur perdu en pleine mer
Luttant contre les éléments déchaînés
Tu aperçois cette lumière régulière
Qui pourrait te dire que tu n’es pas abandonné.
Mais tu ne vis pas dans le même monde.
Tu ne navigues pas, seul, sur l’onde.
Ce que tu fends, c’est la foule
Que tu conçois comme une hostile houle.
Et te cognant contre tes semblables
Que tu maudis, les prenant pour des écueils,
Tu lèves, vers la tour, un regard implacable
D’on ne sait quelle illusion en deuil.
Cette lumière qui paraît s’astreindre
Sans cesse à s’allumer et s’éteindre,
Couronnant des milliers de scintillements,
T’excède prodigieusement.
Et tandis que cette véritable Tour de Babel
Attire dans ses bras lumineux de dentelle
Une hétérogène mais soudée multitude
Sa magie même t’exclut et te renvoie ta propre solitude.